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Dans le souci d’apporter notre contribution au débat, mais aussi et surtout de montrer ce que nous croyons être notre erreur, dans la lutte contre la colonisation, l’imposture, la trahison et la médiocrité, nous livrons ici quelques réflexions sur un document publié par Congo Actualité le 5 décembre dernier, intitulé : “Rien sans le peuple congolais”. Une copie de l’article se trouve à la fin de la présente livraison. Dans notre livraison, le texte en gras est un extrait de l’article. |
Du côté du M23, on veut discuter de l’accord de 2009. Mais Jean-Marie Runiga réclame aussi un dialogue inclusif avec la société civile congolaise, l’opposition et la diaspora sur tous les sujets qui touchent à la vie publique: la démocratie, les droits de l’homme, la bonne gouvernance et la vérité des résultats des élections du mois de novembre 2011. De son point de vue, le retrait de Goma ne doit pas être un préalable, mais le résultat de négociations. Il a déclaré que le M23 n’abandonnera pas la ville de Goma sur la seule promesse d’une ouverture de discussions avec le gouvernement. Le M23 exige d’abord le dialogue avant de penser se retirer de Goma.
Les choses se sont passées autrement. Quand on veux réellement comprendre les enjeux politiques, on comprend qu’il y a une erreur ici.
Des ONG de l’est de la RDCongo ont accusé le gouvernement congolais de s’être «courbé» face aux «Etats agresseurs», sans citer le Rwanda et l’Ouganda voisins.
La réalité est tout autre. Plusieurs ONG sont claires dans leur appréciation du gouvernement de Matata. Ils le trouvent tout simplement incapable et irresponsable. En 1994 et en 2006, la majorité de ces ONG nous prenaient pour des fous. Nos propositions relative à la position à prendre dans les conflits de l’Est leur paraissaient insénsées et irresponsables. Elles ont commencer à se retracter deux mois après les élections de 2006. Aujourd’hui, toutes ou presque, nous ont expressement dit leur regret de n’avoir pas compris notre analyse et d’avoir rejeté nos propositions.
Le vice-président et porte parole de la société civile du Nord-Kivu, Omar Kavota, a qualifié de trahison le fait que les résolutions du sommet légitiment le M23 et que le président de la République, Joseph Kabila et son gouvernement acceptent de discuter avec le M23. «Les FARDC et la population du Kivu ont tous été trahis par le commandement de l’armée et par le pouvoir de Kinshasa, et le résultat est l’avancée du M23», dénonce-t-il.
C’est depuis 1994, que nous prévenions l’Ituri et le Nord-Kivu des erreurs à ne pas commettre. Parmi ces dernières, il y avait : la recherche une solution non-congolaise aux conflits entre congolais d’alors et inviter une force onusienne dans la RDC ! Aujourd’hui, le Nord-Kivu et le Sud-Kivu ont compris notre analyse et adhère. L’Ituri, pour des raisons circonstantielles, n’avoue pas encore son erreur. Il le fera, parce que, les temps ne sont pas et ne seront pas durs qu’au grand Kivu !
Le 25 novembre, le député de l’opposition Jean-Claude Vuemba a jugé «inadmissible» que le pouvoir en place accepte de se mettre autour d’une même table avec le M23 qui occupe Goma depuis le 20 novembre dernier. Pour le président du Mouvement du Peuple Congolais pour la République (MPCR), le gouvernement ne doit pas négocier avec les rebelles qui ont tué des Congolais dans l’est de la RDCongo.
Ce que Jean-Claude Vuemba omet dans son raisonnement c’est que son président, Joseph Hyppolite Kanambe. Il est lui aussi un ancien rebelle. En tant que tel, il a participé à des morts arbitraires d’hommes : congolais ou pas, sur notre territoire ! Et qui pis est, il est aussi l’usurpateur du pouvoir que le peuple congolais a daigné confié à Etienne Tshisekedi wa Mulumba.
C’est depuis trop longtemps que l’opposition congolaise demande des négociations avec le pouvoir après les élections de novembre 2011
C’est là aussi une contradication interne au sein de l’opposition congolaise. Nous sommes nombreux à considérer JHK comme un imposteur. Comment pouvons-nous en même temps solliciter une négociation avec lui ? Dans le cadre de notre recherche de solution, nous considérons comme traîtres ou irresponsables ceux qui se comportent de la sorte. Si nous voulons la paix au Congo, nous devons mettre tout ce qui est de notre pouvoir en oeuvre pour son développement. Cela passe par la disqualification démocratique de tous ceux ceux qui favorisent d’une manière ou d’une autre la colonisation, l’imposture et la médiocrité dans notre pays. Nous pensons qu’il soit logique, de commencer par le nettoyage de notre espace politique que nous avons nous-même pollué d’hommes traîtres, véreux, incompétents, irresponsables. C’est en étant uni, renforcés que nous pourrons dans le prolongement de ce projet, trouver les amis qui nous aident à combattre nos ennemis internationaux que plusieurs considèrent avec raison comme étant plus forts que nous. Il n’y a que les fils du Dieu vivant, créateur des cieux de la terre pour être à même de voir les choses autrement. Ce sont les seuls à même de compte sur une force supérieure unique du Tout-Puissant.
Or jusqu’à ce jour, on a toujours été saboté. Nous n’avons rien eu en échange.
Que nous ayons toujours saboté et n’ayons encore rien eu en échange est normal. Nous avons investi dans le mensonge du MNC en 1960. Nous avons investi dans un coup d’état militaire et la gabégie du MPR, en 1965 puis 1967 respectivement. Comme si ces expériences ne suffisaient pas, nous avons encore volontiers accepter la logique de l’AFDL. Même la perte d’un président, dans des conditions toujours non élucidées ne nous ont pas suffit : nous avons opté pour l’illégalité en acceptant JHK.
La logique, il nous semble, veut que nous payons pour nos forfaits. Il nous revient de restituer dans leurs droits ceux qui à cause de nous ont tout perdu en 1964, entre 1965 et 1997, entre 1997 et 1997 et 2012. Comment et de qui pourrions-nous revendiquer la justice après avoir été injustes autant de fois ? Quand est-ce que la RDC en tant que nation s’est-elle décidée de divorcer d’avec l’injustice, l’arbitraire, le népotisme, la paresse, la trahison des justes, la couardise face à l’agression ? Ce que nous vivons est certe la conséquence de notre richesse en ressources naturelles, mais bien plus le fruit de notre investissement dans l’irresponsabilité, dans la trahison de la nation.
Et voilà que le M23 après avoir fait la guerre à l’Etat se retrouve sur une même table avec le gouvernement congolais pour trouver un accord.
Il n’est pas facile d’affirmer aujourd’hui que le M23 fasse la guerre à l’état. Il suffit pour cela de considérer le sourire de celui que certains considèrent comme chef de l’Etat de la RDC. Lorsqu’il qu’il quitte ceux qu’une frange important de congolais considère comme étant des ennemis du Congo, son langage non-verbal est parlant. Seuls les naïfs se posent toujours les mêmes questions sans se trouver une réponse, sans se former une opinion, une conviction personnelle. Pendant ce temps, le peuple congolais peut continuer à être raillé de toute part. Nos femmes et hommes continuer à être massacrés et violés. Notre intelligenstia pourchassée s’exil et le pays reste sans ressource intellectuelle suffisante ni valable.
Faut-il prendre des armes dans ce pays pour être écouté?
Beaucoup ont pris les armes depuis 1960. Tous n’ont pas su démarrer une vraie indépendance du Congo. Il faut bien s’en rendre compte que ce ne sont pas les armes qui nous mèneront vers la paix et encore moins vers la prospérité. La guerre nous appauvris dans le sens plein du terme : nous mourrons et nous perdons nos ressources, naturelles ou non-naturelles.
Une partie de l’opposition réclamait un dialogue après ces élections émaillées de fraudes et d’irrégularités, sans jamais l’obtenir.
De fait, une partie de l’opposition n’a pas compris ce qu’il fallait faire après un tripatouillage électoral. Elle a pensé qu’on pouvait avoir raison de dialoguer avec des tricheurs. Se plaindre était normalement la démarche démocratique. Seulement, dans un pays où la justice, mieux, le droit, est baffoué, que peut on gagner à aller devant les tribunaux ? L’UNC introduisit un recours. D’aucuns se demandent si c’était pour flouer les congolais. Quoi qu’il en soit, il n’obtint pas gain de cause, comme cela était prévisible. Et c’est ici qu’il faut s’arrêter pour comprendre qu’aller aux élections était la plus grosse erreur de l’opposition, comme en 2006.
Malgré notre sonnette d’alarme, l’opposition prit un risque et se doit aujourd’hui de l’assumer. Mais que se passe-t-il en réalité ? Tout le monde a lâché Etienne Tshisekedi wa Mulumba ou presque. Seul Eugène Diomi Ndongala a tenté de le soutenir, sans prendre quelques précautions qui s’imposaient pourtant. Certains pensent même que sa disparition ne fut qu’un bloeuf… Cependant, il faut se rendre compte que même après avoir récolter de l’argent pour l’impérium, Joseph Hyppolite Kanambe règne encore en maître et que nombreux sont encore ceux qui lui vouent leur admiration, leur soutien même. Qu’importe qu’ils soient minoritaires : ils tiennent bon et jusqu’à présent, le pays demeure sous les griffes de l’imposteur.
Jean-Claude Vuemba a invité le président de la République à convoquer le Congrès pour expliquer aux Congolais «les tenants et les aboutissants» de la guerre que mène le M23.
Voici un homme politique qui croit, lui aussi, bien que de l’opposition, que JHK pourrait expliquer aux congolais “les tenants et les aboutissants” de la guerre que mènerait le M23. Dans une telle condition, comme espérer un salut prochain pour le congolais ? D’où vient-il que nous soyons si lent à comprendre ? Qui nous a frappé d’aveuglement ? Notre explication est simple.
En 1960, nous avons investi dans le mensonge du MNC qui promettait des écoles gratuites pour tous, des soins de santé gratuite. Et comme si l’acceptation de ce mensonge ne suffisait pas, nous lui prêtâmes main forte dans la chasse aux sorciers qu’il prétendait être tous les membres du PNP.
En 1965, nous crûmes volontiers à une autre supercherie. Le coup d’état ne nous révolta pas. La danse dans les stades plutôt que les travax nous satisfirent et nous engageames presque toutes nos filles ou toutes nos femmes dans le projet mobutien. Le ndombolo qui accompagna le règne de la swahiliphonie ne nous mis pas la puce à l’oreil. Très vite, nous fûmes capables de remplacer une divinité par une autre. Le comble de notre folie avancée ne se fit pas attendre. Violant notre constitution, nous acceptâmes, jusqu’aujourd’hui d’ailleurs, l’imposture dans notre pays. Et comme on peut le lire ci-dessus, même l’opposition attends des solutions de l’imposture !
Du côté de la Majorité, le député François Nzekuye, du PPRD, le parti présidentiel, estime que le gouvernement ne négocie pas avec le M23, comme certains le pensent, mais examine plutôt ses revendications. Il a précisé que c’est à la CIRGL de recevoir les doléances du M23 et de les transmettre au gouvernement congolais. «Nous avons dit à Kampala que nous allons examiner les revendications du M23 et d’y répondre dans la mesure du possible. Nous n’avons pas dit que nous allons entamer des négociations directes avec le M23. Les revendications sont transmises aux autorités de la CIRGL qui les transmettront à leur tour au gouvernement de Kinshasa. C’est au gouvernement de voir qu’est-ce qu’il y a de légitime et qu’est-ce qu’il y a de non légitime dans tout cela», a déclaré François Nzekuye.
Comment peut-on prétendre que le gouvernement de Matata Mponyo Mapon examine les revendications du M23 ? Ou sont les preuves qu’un travail soit en cours au conseil des ministres ? Quant aux doléances publiques du M23 qui ont été rendues publiques et qui sont connue du public, pourquoi devraient-elle être reçues par la CIRGL pour être transmises ensuite au gouvernement congolais ? A quoi aurait alors servi les déplacements de Kampala ? Un gouvernement qui ne voit pas l’illégitimité du régime qu’il sert peut-il juger de la légitimité ou de l’illégitimité des revendications du M23 ? Que peut faire le gouvernement de Matata Mponyo Mapon contre le M23 ? Comment s’y prendrait-il ?
“(…)le président rwandais Paul Kagame et son homologue du Congo-Brazzaville, Denis Sassou Nguesso ont appelé, dans un communiqué, le gouvernement de Kinshasa (RDCongo) et les rebelles du M23 à appliquer les décisions prises la veille lors du sommet extraordinaire à Kampala en Ouganda”
Quelle distance entre ce communiqué et la communication des doléances du M23 au gouvernement de Kinshasa pour examen… Tout observateur critique se pose tout de suite la question de savoir quelle intérêt y aurait-il pour le M23 et Kinshasa d’appliquer les décision du sommet extraordinaire de Kampala. Les naïfs croient que cela soient possible…
«l’importance d’évaluer et de comprendre correctement la véritable nature des nombreux groupes armés en RDCongo afin que des solutions appropriées soient trouvées pour chacun d’eux»
Voici déjà plus de 52 ans que les gouvernements qui se succèdent à Kinshasa n’arrivent pas à “comprendre” les véritables natures des groupes armés qui déciment nos populations à ni mettre fin à leurs activités. Or, depuis 1994, nous n’arrêtons de prévenir notre peuple des conséquences de nos actes. (1) Nous avons commis la gestion de la chose publique à des hommes véreux, traîtres ou incompétents. (2) Nous ne pouvons pas construire une nation moderne avec ces responsables véreux ou incompétents. (3) Le devoir de disqualifier ces hommes est nôtre et non pas de la communauté internationale dont nous refusons, expressement de comprendre le fonctionnement. (4) A défaut de répondre à cette problématique, la situation qui prévaut dans notre pays n’ira que de mal en pis.
L’Union Africaine (UA) a appelé les rebelles du M23 à se conformer aux décisions du sommet de Kampala, notamment à cesser les combats, et a salué «l’engagement» de Kinshasa à prendre en compte les revendications des rebelles
Appeler le M23 à se conformer aux décisions du sommet de Kampala, sans expliquer en quoi ces décisions sont avantageuses pour lui, relève d’un enfantiage politique. La réalité est que Kinshasa et le M23 ont tous les deux du sang sur les mains et tentent de ce fait de se protéger mutuellement. Notre peuple doit plutôt comprendre que Kinshasa et le M23 aient besoin des guerres pour leur survie… Jusqu’à ce que les congolais comprennent et les déboutent !
Le 26 novembre, les rebelles du M23 n’ont pas encore quitté la ville de Goma, malgré l’ultimatum de 48 heures que leur avaient lancé samedi les chefs d’Etat de la CIRGL réunis en sommet à Kampala. Le colonel Vianney Kazarama, porte-parole militaire de cette rébellion, dit craindre pour la sécurité de la population civile si le M23 se retirait de la ville. Vianney Kazarama a évoqué la présence des miliciens Maï-Maï et des rebelles des Forces Démocratiques pour la Libération du Rwanda (FDLR) qui, selon lui, insécurisent les habitants.
A l’Est, il n’y a pas que le M23 pour être source d’insécurité. M23, Mai-Mai, Mboromboro, LRA, FPLC, FARDC et bien d’autres sèment tous la même frayeur : pillage, tuerie, tracasseries administratives caractérisent leurs interventions là où ils font la loi. Notre proposition, dans le cadre du Projet 2014, pour juguler ce mal demeure inchangée depuis décembre 1999. (1) Identifier et promouvoir ces vrais leaders en vue de la disqualifications des hommes véreux que nous avons nous-mêmes commis à la gestion de la chose publique. (2) Gestion du pays par projets, sous la conduite des leaders patriotes et compétents ainsi identifiés et promus. Personne ou presque ne veut s’investir dans le sens de notre conseil. La peur de la menace de mort proférer par le régime et les milices contre tout celui qui pense autrement tétanise les populations qui craignent pour leurs peaux.
Selon certains observateurs, depuis le début de la crise congolaise, des sommets de la CIRGL se succèdent et se ressemblent. Au bout du compte, aucun résultat probant n’est obtenu quant au retour d’une paix durable, ni au rétablissement de l’autorité de l’Etat dans l’Est du territoire national.
Notre analyse est que l’on ne peut pas attendre grands choses des rebelles ni d’anciens rebelles. Pour la simple raison que tous à rendre des comptes à la nation pour les âmes inocentes qu’ils ont fait périr pour assouvir leurs bas instincts. De même, il est tout simplement ridicule de parler d’un rétablissement de l’autorité de l’Etat dans un pays où l’Etat n’a jamais joui de son autorité. Pour le congolais, l’après l’indépendance est, à certains points, pire qu’avant l’indépendance. Pour la simple raison que les colons européens sont remplacés par des colons congolais d’abord, africains ensuite ! La domination du congolais continue. Elle perdurera jusqu’au jour où le congolais décidera de ce qu’il veut faire du pays hérité de l’indépendance de Lumumba. Indépendance que certains qualifient déjà de maléfique – faute de connaissance – ou regrette même – faute d’engagement…
Kigali et Kampala ont fait, subtilement, traîner les choses en longueur en vue de fléchir les positions congolaises.
Ultimément, les positions congolaises, mieux, les positions de Kinshasa, ne peuvent pas être autre chose que celles du M23. Pour les multiples raisons évoquées ci-haut. La frange démocratique de la population congolaise, elle, qui attend que la vérité des urnes soient respectées, se trompe sur la stratégie à adopter pour arriver à bout de l’imposture, de la colonisation, de la trahison et du sous-développement qu’ils engendrent. Que le président Etienne Tshisekedi wa Mulumba assure son mandat est ce qui amorcerait un certain processus de démocratisation du pays, mais ne serait pas encore suffisant pour que nos peuples aient leur indépendance. Pendant ce temps, les promesses du peuple, de 2011, d’aller jusqu’au bout de l’imposture, en soutenant le président élu, ne sont pas tenues et nous vaut la malédiction que nous connaissons ; que nous refusions ou reconnaissions notre faute. Plusieurs fois, certains n’ont pas compris que les sorties dans les rues n’apporteraient pas le résultat attendu ; non plus que les sit-ins et casses diverses, à l’extérieur comme à l’intérieur du pays.
Les positions du régime de Kinshasa étant ultimément celles du M23, il faut plutôt se rendre compte que les jeux se jouent bien entre les bandits politiques de l’Afrique Centrale.
Le sommet de Kampala V risque de dédouaner les agresseurs de la RDCongo face à une reconnaissance implicite du M23.
Le sommet de Kampala V ne risque pas de dédouaner les agresseurs de la RDC, l’Uganda et le Rwanda, aux yeux de plusieurs congolais de l’opposition. Le sommet de Kampala V était une reconnaissance implicite du droit du M23 au chapitre. Faute de ne pas le faire, le régime de Kinshasa pourrait être mis en mal. Il ne faut pas que Kanambe, Ntaganda, Nkundabatware et autres aillent au CPI. Le prix sacrifice à offrir sur l’autel des démons est le sang de plusieurs congolais, chaque jour, là où faire se peut. Pourvu que l’on survive ! Ceux de nos compatriotes qui ne veulent pas comprendre cette logique de guerre, regretteront toujours de ne nous avoir compris à temps pour sauver des millions de vies humaines.
Dans ce cas, la dimension interne de la crise étant établie, voire la caducité du rapport des experts onusiens ne serait plus qu’une question de bon sens.
Les guerres à l’Est ont une dimension interne non négligeable. Les rwandophones, congolais et non congolais, sont visiblement un problème non seulement dans le Masisi, particulièrement, mais aussi dans le Sud-Kivu. L’écoute des populations locales et même des populations du Rwanda ne laisse pas de doute sur cette réalité. Le refus de certains congolais de reconnaître cette réalité pousse plusieurs vers de mauvais traitements des problèmes.
Dans ce contexte, la question de la survivance des tutsi se pose avec acuité pour certains, qui tiennent compte des nombreuses initiatives prises par ceux-ci pour susciter la compassion internationale en vue de leur survie. Jouant la carte de la menace de son identité, de sa survie, le tutsi semble obtenir avec brio l’adhésion de la communauté internationale à sa cause. A y voir de près, cette stratégie ne paiera pourtant pas. Il n’est pas certain qu’après Paul Kagame, le tusti tienne face à la majorité des ennemis qu’il s’est désormais créés dans l’Afrique Centrale. Il pouvait se réfugier au Congo jusque-là. Il ne saura plus le faire après
En même temps, il est certains qu’ils n’y a pas que les occidentaux et les asiatiques pour convoiter les richesses naturelles du Congo. Plusieurs pays africains, face à la démission des congolais, tentent, lâchement et acceptant de prendre le risque, de profiter de la léthargie des congolais.
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Congo Actualité 168
05 décembre 2012
SOMMAIRE
ÉDITORIAL: Rien sans le peuple congolais
1. LA SITUATION SUR LE TERRAIN
2. LE 5ÈME SOMMET DE LA CIRGL À KAMPALA
a. Le sommet
b. Les réactions de la Société Civile et des Partis politiques
c. Les réactions internationales
d. Les réactions du M23
e. Évaluations et prévisions
f. Après l’expiration de l’ultimatum
3. LES PROPOSITIONS DE LA SOCIÉTÉ CIVILE
4. LES OBJECTIFS CACHÉS DE LA GUERRE DU M23
ÉDITORIAL: RIEN SANS LE PEUPLE CONGOLAIS
Le M23 se retire pour mieux bondir.
Le 20 Novembre, la ville de Goma, chef-lieu de la province du Nord-Kivu, dans l’est de la
République Démocratique du Congo (RDCongo), a été assiégée et occupée par le Mouvement du
23 Mars (M23), un groupe terroriste armé et soutenu par le Rwanda et l’Ouganda, deux pays
voisins. L’armée et la direction politique de ce groupe sont dans les mains de personnalités qui,
pour origine, culture, langue, appartenance ethnique ou pour toute autre raison, sont étroitement
liées à l’actuel régime rwandais.
Sous la pression internationale, le 30 novembre, le M23 a commencé à se retirer de la ville pour se
transférer à une trentaine de Km plus au nord. Cependant, on ne peut pas encore se permettre un
petit souffle de soulagement, car ils vont partir avec des dizaines de camions bondés d’armes,
munitions, nourriture et médicaments. La menace sur Goma reste donc intacte, d’autant plus qu’ils
se retirent après que le gouvernement congolais leur a promis de tenir compte de leurs
revendications. C’est ça le problème.
Un dialogue dans la disparité.
Il ne sera pas facile dialoguer ou négocier avec eux puisque, pour le soutien reçu de l’extérieur, ils
possèdent une force militaire « apparemment » supérieure à celle de l’armée congolaise.
Le groupe accuse le gouvernement congolais de ne pas respecter ses engagements pris lors des
accords du 23 Mars 2009, signés avec un groupe armé précédent, le Congrès National pour la
Défense du Peuple (CNDP), dont le M23 est issu. Parmi leurs revendications, ils demandent que
leurs militaires soient déployés uniquement au Kivu, pour protéger « leurs » familles de la menace
d’autres groupes armés. En fait, c’est un prétexte pour poursuivre leurs activités de contrebande des
minerais du Kivu. Beaucoup d’entre eux sont cités, à cet égard, dans des différents rapports du
groupe d’experts de l’ONU pour la RDCongo.
Sur la base d’une loi sur l’amnistie adoptée par le gouvernement à la suite des accords du 23 Mars
2009, ils demandent la suspension de l’arrestation de l’un d’entre eux, Bosco Ntaganda, objet de
deux mandats d’arrêt délivrés par la Cour Pénale Internationale (CPI). Mais la loi d’amnistie ne
Rés. PAIX POUR LE CONGO
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E-mail : info@paceperilcongo.it
Web: http://paceperilcongo.it/fr
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s’applique qu’aux actes de guerre, en excluant les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité,
crimes imprescriptibles en vertu du droit international. En fait, à travers la défense de Bosco
Ntaganda, ils essayent de garantir leur impunité. Ils se disent victimes de discrimination au sein de
l’armée congolaise et réclament les rangs militaires « acquis » pendant la rébellion. Mais, en fait, ce
sont eux qui, avant de déserter l’armée, déjà occupaient les plus hautes fonctions de
commandement, en particulier au niveau central et dans les deux provinces du Kivu. Les véritables
discriminés sont des militaires d’origine congolaise.
Pour faire avaler la pilule amère, ils la recouvrent avec le sucre. Ils affirment avoir pris les armes
pour défendre les droits de l’homme, la démocratie, la vérité des urnes, la paix. Pendant ce temps,
ils violent, pillent, recrutent des enfants soldats, imposent des taxes, forcent des centaines de
milliers de personnes à fuir.
Les véritables objectifs cachés.
Derrière leurs demandes plus ou moins évidente, certainement moins légitimes de ce qu’ils
voudraient faire croire, il y en a d’autres qui restent encore cachées. Selon certains observateurs,
fort du succès militaire remporté lors de la chute de Goma, le M23 pourrait revendiquer des postes
politiques et militaires, y compris le ministère de la Défense, l’état-major général des FARDC, les
gouvernorats du Nord et du Sud-Kivu, la validation des leurs députés élus à Masisi bien que, dans
cette circonscription, les élections ont été annulées en raison de nombreuses violences et de graves
irrégularités. Il pourrait revendiquer, au Nord-Kivu, la création d’une nouvelle province qui
comprendrait les territoires de Nyiragongo, Masisi, Rutshuru et Walikale, exclusivement réservée à
une population rwandophone, les Tutsis et les Hutus congolais et rwandais. La souveraineté
nationale et l’intégrité territoriale de la RDC est gravement menacée.
Plus jamais de huis clos.
Selon plusieurs membres de la société civile congolaise, face à la menace du M23, il est nécessaire
construire une cohésion nationale compacte entre toutes les principales forces du pays: la majorité,
l’opposition et la société civile. En particulier, on demande à la classe politique plus de
responsabilité, plus de nationalisme et plus de patriotisme. Il est impératif que le gouvernement et
l’opposition puissent surmonter leurs différends sur le pouvoir, en faveur de l’intérêt supérieur de
l’unité de la nation.
Le Président Kabila a promis un «dialogue» avec le M23, qui devra avoir lieu immédiatement après
sa retraite de la ville de Goma. On doit éviter les erreurs du passé. Puisque la souveraineté nationale
et l’intégrité territoriale du Pays sont des questions nationales, toutes les couches de la vie publique
devraient y participer: le gouvernement, le Parlement (majorité et opposition) et la société civile. Le
dialogue devrait se pencher exclusivement sur l’évaluation de la mise en oeuvre des accords du 23
Mars 2009, comme exigé par le même M23 au début de sa rébellion, au début du mois de mai. Les
conclusions du dialogue devraient être transmises au Parlement, convoqué en Congrès (les deux
chambres réunies), pour discussion et approbation. Seulement après, le gouvernement pourrait
procéder à leur promulgation. Tout le processus devrait se dérouler à la lumière du soleil, avec la
présence des médias. La logique de négociations à huis clos n’est ni démocratique, ni respectueuse
du peuple souverain qui a le droit inaliénable d’être constamment informé de l’évolution du
dialogue et des procédures subséquentes. Le M23 ne peut pas se permettre de s’approprier avec la
force des armes ce qui appartient seulement au peuple. Le M23 doit être honnête, s’il en a encore
les moyens, pour se confronter à la volonté populaire et s’y soumettre.
Ainsi fonctionne la démocratie!
Pas besoin que les pyromanes se transforment en sapeurs-pompiers.
Le Rwanda et l’Ouganda qui, afin d’éviter des sanctions de la part de la communauté internationale,
ont toujours nié les allégations, bien documentées dans le rapport du groupe d’experts de l’ONU,
sur leur soutien au M23, ont réussi à faire passer l’idée que le l’existence de ce groupe est un
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problème interne congolais, même si ça ne correspond pas à la vérité. Qu’ils cessent alors
immédiatement, sans conditions et définitivement d’interférer dans les affaires politiques, militaires
et économiques de la RDCongo. Si, à leur avis, le M23 est un problème interne de la RDCongo,
qu’ils laissent les Congolais le résoudre entre eux. Il en dépend le bon déroulement du dialogue qui
est sur le point de commencer et toute la vie du peuple congolais. Si, au contraire, ils vont insister
pour faire partie de la solution du problème, cela signifie qu’ils font partie du problème lui-même. Il
faut mettre finalement fin à la dynamique des pyromanes qui prétendent se présenter en sapeurspompiers.
Le peuple congolais a depuis longtemps ouvert les yeux et si l’on continue à tolérer cette
ingérence sans la sanctionner, il pourrait répondre, à son tour, par la violence. Qui en sera alors
responsable? La communauté internationale aussi devra y réfléchir.
1. LA SITUATION SUR LE TERRAIN
Le 21 novembre, le M23 a pris la cité de Sake (27 km à l’ouest de Goma), où s’étaient retranchées
les Forces Armées de la RDCongo (FARDC). Le 22 novembre, en coalition avec les Mai-Mai de
l’APCLS, les FARDC ont procédé à une contre offensive qui, dans la mi-journée, leur a permis de
déloger le M23 de la cité. C’est aux environs de 17 heures locales, que les rebelles ont lancé un
nouvel assaut et que vers 20 heures, les FARDC ont dû décrocher, abandonnant leurs positions. Les
rebelles auraient par la suite pris la direction de Kirotshe au Sud, Mushaki au Nord-Ouest et Kingi
sur l’axe Masisi-centre. Au cours de ces affrontements, quatre personnes ont trouvé la mort, dont un
militaire.1
Le 23 novembre, le porte-parole des Forces armées de la RDCongo (FARDC), le Colonel Olivier
Hamuli, a déclaré que plus de trois milles cinq cents hommes se sont regroupés dans la cité de
Minova, à la frontière entre le Nord et le Sud-Kivu pour tenter d’enrayer la progression du M23
vers Bukavu. Ces militaires viennent de Sake et d’autres localités tombées entre les mains des
rebelles du M23. Depuis leur offensive lancée le jeudi 15 novembre, ces rebelles occupent
Kibumba, Munigi, Goma, Sake et Mushaki.2
Le 24 novembre, à Goma, la présence des rebelles en armes était plus discrète que ces derniers
jours. Selon le colonel Vianney Kazarama, porte-parole militaire de la rébellion, les troupes (du
M23) ne sont plus dans la ville, désormais démilitarisée. Selon lui, il y reste l’état-major militaire et
les policiers.3
Le 25 novembre, la Monusco, la force de l’ONU en RDCongo, a évacué de Goma, capitale
provinciale du Nord-Kivu, vingt-deux magistrats qui se disent victimes de menaces de mort de
la part des rebelles du M23. Ces magistrats sont arrivés à Kinshasa. Le juge Michel Magasani, un
des magistrats évacués, affirme qu’ils ont commencé à subir des attaques et des messages de
menace de mort et il raconte comment un de ses collègues a récemment échappé à la mort à Goma:
«Il a rencontré un groupe de rebelles du M23 qui l’ont mis à genou. Un des rebelles lui a dit en
braquant sur lui une arme: « Tu m’as condamné à 12 ans de prison et moi je te condamne à la
mort ». Le magistrat s’est échappé après une dispute entre rebelles». D’autres magistrats auraient
reçu des messages de menaces sur leurs téléphones. Le chef de police de la Monusco, le général
Abdallah Wafi, qui a conduit cette évacuation, demande qu’une assistance leur soit accordée, car ils
ont laissé leurs familles et tous leurs biens à Goma. L’officier onusien assure qu’en dehors des
magistrats, il y a aussi des officiels, notamment les membres du gouvernement et de l’assemblée
1 Cf Radio Okapi, 23.11.’12
2 Cf Radio Okapi, 24.11.’12
3 Cf AFP – Kampala, 24.11.’12
4
provinciale ainsi que des éléments des FARDC et de la police, qui ont manifesté le désir d’être
évacués de Goma.4
Le 26 novembre, les rebelles du M23 n’ont pas encore quitté la ville de Goma, malgré l’ultimatum
de 48 heures que leur avaient lancé samedi dernier les chefs d’Etat de la CIRGL réunis en sommet à
Kampala. Les rebelles du M23 étaient encore visibles dans la matinée dans les rues de Goma et
dans certains lieux stratégiques comme les banques. Les domiciles de certains officiers des FARDC
sont toujours occupés par les dignitaires du M23, affirment des témoins. Mais Vianney Kazarama
affirme que seuls, l’administration du M23, la police de ce mouvement ainsi que son Etat-major
sont encore présents dans la ville. Selon lui, le gros des troupes du M23 se trouve à Mushaki, à plus
de 30 km au Sud-Ouest de Goma, et vers Munigi, à 10 km au Nord de la ville.
Les rebelles du M23 ont consolidé leurs positions sur les hauteurs proches de Goma et autour de
Sake. Ils ont érigé une barrière à Mugunga sur la route Goma-Saké où ils exigent 10 dollars
américains par véhicule à destination ou en provenance de Minova, au Sud-Kivu.
Selon plusieurs témoignages, les commerçants qui empruntent ce tronçon routier sont contraints de
payer 5 dollars américains. Les propriétaires de gros camions transportant des produits agricoles
déboursent 350 dollars américains comme droit de passage.
Plusieurs cas de pillages et de vols sont enregistrés dans plusieurs quartiers de la ville de Goma. Des
témoins rapportent que ce serait surtout des maisons des personnalités qui ont fui la ville, des
habitations des ministres, des autorités militaires et même des particuliers, des bureaux des
institutions provinciales qui sont visés. Les mêmes sources attribuent ces actes à des hommes en
armes habillés en tenue militaire. En ville, les activités ont repris peu à peu, mais les habitants ne
croient pas au retrait facile du M23, tant que les négociations avec le gouvernement ne sont pas
encore entamées.5
2. LE 5ÈME SOMMET DE LA CIRGL À KAMPALA
a. Le sommet
Le 24 novembre, un sommet extraordinaire de la CIRGL, consacré à la situation sécuritaire dans
l’Est de la RDCongo, s’est ouvert à Kampala en Ouganda. Il se tient trois jours après la réunion des
présidents congolais, rwandais et ougandais dans la capitale ougandaise qui ont exigé au M23 de
mettre fin à leur offensive et de se retirer de la ville de Goma. Le président congolais y prend part,
mais son homologue rwandais, Paul Kagame, n’y assiste pas. Il est représenté par sa ministre des
Affaires étrangères, Louise Mushikiwabo. Des officiels rwandais invoquent d’autres engagements
et notamment la visite à Kigali ce samedi du président Denis Sassou-Nguesso du Congo-
Brazzaville. Cette visite devrait également être consacrée à la situation sécuritaire dans la région des
Grands lacs. Une délégation du M23 conduit par son coordonnateur, Jean-Marie Runiga, se trouve
également à Kampala mais pas dans le centre où doit se tenir le sommet.
En clôturant le sommet, les chefs d’Etat des Grands Lacs ont demandé au M23 de quitter les
positions qu’ils ont conquises après leur dernière offensive, de stopper son extension territoriale et
de ne plus remettre en question le gouvernement de la RDCongo. Plus précisément, ils ont demandé
aux rebelles du M23 de se retirer de la ville de Goma dans un délai de deux jours (48 heures) et de
se positionner à environ 20 km au nord de Goma (près de Kibumba).
Ils ont décidé du déploiement, à l’aéroport de Goma, actuellement tenu par la Monusco, d’une force
composite comprenant une compagnie des FARDC, une compagnie du M23 et une compagnie de la
force internationale neutre, qui n’a pas encore été précisément définie. Pour le financement de cette
4 Cf Radio Okapi, 26.11.’12
5 Cf Radio Okapi, 26 et 27.11.’12
5
force internationale neutre, la RDCongo a promis d’y contribuer. Ce financement est estimé à 100
millions de dollars américains pour une année.
Dans la ville de Goma, on déploiera un bataillon de l’armée congolaise et un autre de la police. Les
rebelles du M23 sont sommés de remettre à la police les armes délaissées par les militaires
congolais dans les localités qu’ils ont conquises.
La Monusco va assurer la sécurité dans la zone considérée désormais comme neutre, celle comprise
entre Goma et les nouvelles zones occupées par le M23.
En échange, le gouvernement congolais serait prêt à «écouter, évaluer et prendre en compte les
revendications légitimes» du M23, concernant la mise en oeuvre de l’accord signé en mars 2009 par
le Conseil National pour la Défense du Peuple (CNDP) et le gouvernement de Kinshasa. Ils ne sont
toutefois pas allés jusqu’à évoquer la possibilité d’un «dialogue» comme l’avait demandé le M23.6
Le 24 novembre, à Kampala, sous l’égide du chef de l’Etat ougandais, Yoweri Museveni, le
président congolais Joseph Kabila a rencontré une délégation du M23 conduite par son chef
politique, Jean-Marie Runiga. Les deux parties, le gouvernement congolais d’un côté et la rébellion
du M23 de l’autre, vont maintenant se mettre d’accord sur ce qu’ils vont négocier ou pas.
Du côté congolais, Raymond Tchibanda, le chef de la diplomatie, estime qu’une fois les rebelles ont
retiré leurs troupes de Goma, le dialogue devra porter sur une évaluation de la mise en oeuvre de
l’accord du 23 mars 2009.
Du côté du M23, on veut discuter de l’accord de 2009. Mais Jean-Marie Runiga réclame aussi un
dialogue inclusif avec la société civile congolaise, l’opposition et la diaspora sur tous les sujets qui
touchent à la vie publique: la démocratie, les droits de l’homme, la bonne gouvernance et la vérité
des résultats des élections du mois de novembre 2011. De son point de vue, le retrait de Goma ne
doit pas être un préalable, mais le résultat de négociations. Il a déclaré que le M23 n’abandonnera
pas la ville de Goma sur la seule promesse d’une ouverture de discussions avec le gouvernement.
Le M23 exige d’abord le dialogue avant de penser se retirer de Goma.7
b. Les réactions de la Société Civile et des partis politiques
Des ONG de l’est de la RDCongo ont accusé le gouvernement congolais de s’être «courbé» face
aux «Etats agresseurs», sans citer le Rwanda et l’Ouganda voisins. La fédération Société civile du
Nord-Kivu s’est dite «complètement déçue des résolutions adoptées à Kampala» qui n’ont fait que
«légitimer le M23» et «brader», selon elle, la «souveraineté de la Nation».
Le vice-président et porte parole de la société civile du Nord-Kivu, Omar Kavota, a qualifié de
trahison le fait que les résolutions du sommet légitiment le M23 et que le président de la
République, Joseph Kabila et son gouvernement acceptent de discuter avec le M23. «Les FARDC et
la population du Kivu ont tous été trahis par le commandement de l’armée et par le pouvoir de
Kinshasa, et le résultat est l’avancée du M23», dénonce-t-il.8
6 Cf Radio Okapi, 24.11.’12; AFP – Kampala, 24.11.’12. L’accord du 23 mars 2009 prévoyait notamment l’intégration
des forces du CNDP au sein des FARDC et de la police nationale, avec la reconnaissance de leurs grades.
Le CNDP revendiquait également une loi d’amnistie en faveur de ses hommes, couvrant la période de juin 2003 jusqu’à
la date de la promulgation de l’accord.
Le CNDP et le gouvernement avaient convenu de la nécessité de mettre en place des mécanismes fiables et efficaces de
bonne gouvernance à tous les niveaux et dans tous les domaines, y compris celui de la certification, de l’exploitation, de
l’évaluation et du contrôle des ressources naturelles.
Cet accord contient une clause demandant la mise en place d’un nouveau modèle de découpage du territoire national
fondé sur «la nécessité d’une meilleure prise en compte possible des réalités sociologiques du pays». Il inclut aussi la
reconnaissance des provinces du Nord et du Sud-Kivu comme des «zones sinistrées».
7 Cf RFI, 25.11.’12;
8 Cf Radio Okapi, 24.11.’12; AFP – Kampala, 24.11.’12.
6
Le 25 novembre, le député de l’opposition Jean-Claude Vuemba a jugé «inadmissible» que le
pouvoir en place accepte de se mettre autour d’une même table avec le M23 qui occupe Goma
depuis le 20 novembre dernier. Pour le président du Mouvement du Peuple Congolais pour la
République (MPCR), le gouvernement ne doit pas négocier avec les rebelles qui ont tué des
Congolais dans l’est de la RDCongo. «C’est depuis trop longtemps que l’opposition congolaise
demande des négociations avec le pouvoir après les élections de novembre 2011. Or jusqu’à ce
jour, on a toujours été saboté. Nous n’avons rien eu en échange. Et voilà que le M23 après avoir
fait la guerre à l’Etat se retrouve sur une même table avec le gouvernement congolais pour trouver
un accord. Nous ne pouvons pas l’accepter. Faut-il prendre des armes dans ce pays pour être
écouté?», s’est interrogé Jean-Claude Vuemba. Une partie de l’opposition réclamait un dialogue
après ces élections émaillées de fraudes et d’irrégularités, sans jamais l’obtenir. Jean-Claude
Vuemba a invité le président de la République à convoquer le Congrès pour expliquer aux
Congolais «les tenants et les aboutissants» de la guerre que mène le M23.
Du côté de la Majorité, le député François Nzekuye, du PPRD, le parti présidentiel, estime que le
gouvernement ne négocie pas avec le M23, comme certains le pensent, mais examine plutôt ses
revendications. Il a précisé que c’est à la CIRGL de recevoir les doléances du M23 et de les
transmettre au gouvernement congolais. «Nous avons dit à Kampala que nous allons examiner les
revendications du M23 et d’y répondre dans la mesure du possible. Nous n’avons pas dit que nous
allons entamer des négociations directes avec le M23. Les revendications sont transmises aux
autorités de la CIRGL qui les transmettront à leur tour au gouvernement de Kinshasa. C’est au
gouvernement de voir qu’est-ce qu’il y a de légitime et qu’est-ce qu’il y a de non légitime dans tout
cela», a déclaré François Nzekuye.9
c. Les réactions internationales
Le 25 novembre, réunis à Kigali (Rwanda), le président rwandais Paul Kagame et son homologue
du Congo-Brazzaville, Denis Sassou Nguesso ont appelé, dans un communiqué, le gouvernement
de Kinshasa (RDCongo) et les rebelles du M23 à appliquer les décisions prises la veille lors du
sommet extraordinaire à Kampala en Ouganda. Ils ont noté «l’importance d’évaluer et de
comprendre correctement la véritable nature des nombreux groupes armés en RDCongo afin que
des solutions appropriées soient trouvées pour chacun d’eux», poursuit le communiqué.
L’Union Africaine (UA) a appelé les rebelles du M23 à se conformer aux décisions du sommet de
Kampala, notamment à cesser les combats, et a salué «l’engagement» de Kinshasa à prendre en
compte les revendications des rebelles.10
Le 25 novembre, dans un communiqué, le Secrétaire Général de l’Onu, Ban Ki Moon, a appelé le
M23 à rendre immédiatement ses armes et à procéder au retrait immédiat de ses forces de Goma,
conformément aux décisions du sommet extraordinaire de la CIRGL qui s’est tenu à Kampala.11
d. Les réactions du M23
Le 26 novembre, le mouvement rebelle du M23 a affirmé dans un communiqué ne pas avoir encore
reçu par la «voie officielle» les résolutions du sommet de Kampala exigeant son retrait de Goma, et
donnera «sa position» quand elles lui seront communiquées. Le chef du M23 Jean-Marie Runiga,
présent dans la capitale ougandaise en marge du sommet, «a essayé, sans y parvenir, d’obtenir par
la voie officielle copie de ladite résolution», est-il ajouté.12
9 Cf Radio Okapi, 26.11.’12
10 Cf AFP – Kigali, 25.11.’12; Radio Okapi, 25.11.’12; AFP – Jeuneafrique.com, 25.11.’12
11 Cf Radio Okapi, 26.11.’12
12 Cf AFP – 7×7, 26.11.’12
7
Le 26 novembre, les rebelles du M23 n’ont pas encore quitté la ville de Goma, malgré l’ultimatum
de 48 heures que leur avaient lancé samedi les chefs d’Etat de la CIRGL réunis en sommet à
Kampala. Le colonel Vianney Kazarama, porte-parole militaire de cette rébellion, dit craindre pour
la sécurité de la population civile si le M23 se retirait de la ville. Vianney Kazarama a évoqué la
présence des miliciens Maï-Maï et des rebelles des Forces Démocratiques pour la Libération du
Rwanda (FDLR) qui, selon lui, insécurisent les habitants.13
e. Évaluations et prévisions
Des agresseurs habillés en médiateurs.
Selon certains observateurs, depuis le début de la crise congolaise, des sommets de la CIRGL se
succèdent et se ressemblent. Au bout du compte, aucun résultat probant n’est obtenu quant au retour
d’une paix durable, ni au rétablissement de l’autorité de l’Etat dans l’Est du territoire national.
Kigali et Kampala ont fait, subtilement, traîner les choses en longueur en vue de fléchir les positions
congolaises. La prise de Goma en est la parfaite illustration d’une stratégie visant à faire du M23
une affaire des Congolais, puis imposer sa présence à la table des négociations.
Le sommet de Kampala V risque de dédouaner les agresseurs de la RDCongo face à une
reconnaissance implicite du M23. Dans ce cas, la dimension interne de la crise étant établie, voire la
caducité du rapport des experts onusiens ne serait plus qu’une question de bon sens. Les assises de
Kampala V n’auront pour finalité que d’éviter les nécessaires sanctions à l’encontre de Kigali et
Kampala. Kinshasa n’exclut plus l’option des négociations directes avec le M23 dont,
curieusement, les revendications ont été jugées «légitimes» dans cette rencontre.
Kigali et Kampala n’attendent plus que ce moment pour se dédouaner de toute implication dans la
crise qui sévit dans l’Est de la RDCongo.
Après avoir longtemps résisté, Kinshasa serait sur la voie de lâcher du lest en acceptant enfin de
rencontrer les rebelles du M23 pour, selon les conclusions de la déclaration du mini-sommet de
Kampala, «examiner les causes du mécontentement» et voir dans quelle mesure «y répondre dans la
mesure du possible». Ce qui sous-entend des négociations pour éventuellement aplanir les
divergences aux fins de dégager un compromis autour des questions qui divisent. Si les
négociations directes avec le M23 ont l’avantage de limiter les dégâts sur le terrain d’affrontement,
elles ont néanmoins l’inconvénient de faire la part belle aux pays désignés comme agresseurs de la
RDCongo, à l’occurrence le Rwanda et, dans une certaine mesure, l’Ouganda. Ainsi, accepter de
négocier avec le M23, c’est autrement disculper Kigali et Kampala de tout soupçon d’agression.
Quoi que salutaire pour les populations civiles qui paient le lourd tribut de la recrudescence des
violences dans l’Est du pays, l’option des négociations suppose la reconnaissance, autant par
Kinshasa que d’autres qui soutiennent encore la thèse de l’agression, de l’existence d’un problème
congolo-congolais, supposé être le nerf de la nouvelle rébellion portée par le M23. Ce n’est pas
donc pas pour rien que le Rwanda et l’Ouganda soutiennent vivement l’option des négociations en
faisant pression au sein de la CIRGL pour que la RDCongo se plie à cette exigence.
Il y a bien des raisons qui légitiment cet acharnement de la CIRGL à vouloir à tout prix initier des
négociations entre le M23 et la RDCongo. En effet, le rapport final du groupe des experts des
Nations unies sur la RDCongo a mis à nu la forte contribution du Rwanda, essentiellement, et de
l’Ouganda, en second lieu, dans la rébellion du M23.
C’est dire qu’en acceptant de se mettre autour d’une table avec le M23, Kinshasa va indirectement
dédouaner ses deux voisins de l’Est dans l’action initiée par le M23. Il va donner des arguments à
Kigali et à Kampala; des arguments que ces deux capitales pourraient bien s’en servir pour un
plaidoyer devant les instances qui les ont unanimement condamnés au regard de leur appui avéré au
13 Cf Radio Okapi, 26.11.’12
8
M23. Les négociations directes entre Kinshasa et le M23 signifient autrement que Kigali et
Kampala n’ont jamais été associés au M23.
Dans cette hypothèse, Kigali et Kampala vont allégrement étoffer leur beau rôle de médiateur dans
la crise congolaise en cherchant à agir sur mandat de la CIRGL. Les négociations directes avec le
M23 ont deux grandes conséquences fâcheuses sur le plan diplomatique. D’une part, elles
légitiment le président Kagame dans sa position qui a toujours considéré la situation dans l’Est
comme un problème congolo-congolais. D’autre part, elles remettent par conséquent en cause le
travail des experts de l’ONU sur la RDCongo. Sous la casquette de médiateurs, Kigali et Kampala
pourront continuer à agresser et piller la RDCongo en toute impunité, pour le compte des
multinationales occidentales et avec le consentement de la communauté internationale.14
Selon certains observateurs, depuis le début, la CIRGL a cherché par différents stratagèmes à
amener Kinshasa à négocier avec le M23. Ce qui devait, espérait-elle, disculper des pays tels que le
Rwanda et l’Ouganda de toute implication dans la rébellion du M23. Elle a gagné son pari. Avec
elle, Kagame et Museveni, cités par l’ONU comme principaux soutiens du M23, se trouvent
dédouanés. Autrement dit, ils ne mériteraient plus de sanctions de la part des Nations Unies.15
La légalisation d’un mouvement terroriste et l’exonération de ses parrains.
Selon d’autres, la rébellion du M23 a été la grande gagnante du sommet extraordinaire de la
CIRGL. Qualifié de terroriste lors des précédents sommets de Kampala ainsi que celui de la
Francophonie à Kinshasa, ce groupe a finalement été reconnu comme une rébellion interne qui
occupe une partie de l’Est de la RDCongo. Le M23 n’a pas été sommé de quitter le territoire de la
RDCongo. Autrement dit, la CIRGL lui reconnaît une existence légale dans le Nord-Kivu, une
province qui fait pourtant partie d’un Etat souverain. En recevant le plus officiellement du monde le
président de sa branche politique, Jean-Marie Runiga Lugerero, le président ougandais a cautionné
un fâcheux précédent qui dément toutes les accusations portées contre son propre pays et, partant, le
Rwanda, épinglés jusque-là comme agresseurs de la RDCongo et parrains du M23. Le piège tendu
de longue date par les officiels rwandais et ougandais à leurs homologues congolais vient enfin de
se refermer sur ces derniers.
Les régimes de Kigali et Kampala viennent de réussir, à peu de frais, l’exploit de faire accréditer la
thèse d’une crise congolo-congolaise au Nord et Sud-Kivu, avec pour la toile de fond le non respect,
par Kinshasa, des engagements pris dans le cadre de l’Accord du 23 mars 2009. Grâce au Sommet
extraordinaire de Kampala, le M23 peut donner le maximum de voix pour exiger la satisfaction, par
son «partenaire» qu’est le gouvernement congolais, de ses revendications diverses au chapitre du
«partage équitable et équilibré du pouvoir».16
Possibles revendications.
Selon certains analystes, après la chute de Goma et le dernier sommet de la CIRGL à Kampala, le
M23 pourrait revendiquer des postes politico-militaires, parmi lesquels une Vice-Primature, celle en
charge de la Défense en particulier, l’Etat-major général des Fardc, les Gouvernorats du Nord et
Sud Kivu, la reconnaissance indistincte des grades proposés par le M23 (ex Cndp), pour tous ses
éléments, la permanences de ses troupes au Kivu et la suspension de l’actuation du mandat d’arrêt
émis contre Bosco Ntaganda par la CPI. Il exige aussi un nouveau dialogue inclusif devant
s’étendre à toute l’Opposition, à la Société Civile et à la diaspora congolaise. De manière claire, le
M23 lance au Gouvernement le message que voici: soit vous accédez à nos revendications sans
14 Cf Le Potentiel – Kinshasa, 23.11.’12 http://www.lepotentielonline.com/3375-negociations-avec-le-m23-le-oui-dekinshasa-
dedouane-kigali-de-tout-soupcon-d-agression
15 Cf Le Potentiel – Kinshasa, 25.11.’12
16 Cf Kimp – Le Phare – Kinshasa, 26.11.’12
9
discuter, soit nous vous embarquons dans le périlleux processus d’un dialogue inclusif. La
dynamique générale de ces assises serait, en effet, de nature particulièrement hostile à Kabila et à
son système. Le but poursuivi est simple: contraindre Kinshasa à choisir entre la noyade certaine
dans le cadre d’un dialogue inclusif et la perspective de s’en tirer bon compte en accédant
directement et sans contrepartie, aux revendications du M23.
En effet, en traitant directement avec le M23, en dehors de tout cadre inclusif, Kinshasa aura
l’avantage de conserver pour lui une marge de manoeuvre plus large. Mais il faudra alors faire face à
la fronde politique qui va naître, pendant que les marionnettes rwandaises vont se la couler douce.17
f. Après l’expiration de l’ultimatum
Le 26 novembre, le chef militaire du M23, le colonel Sultani Makenga, s’est rendu à Kampala pour
y rencontrer le chef d’état-major de l’armée ougandaise, Aronda Nyakayirima, qui devrait lui
relayer les conclusions du sommet de la CIRGL à propos du retrait du M23 de la ville de Goma.18
Le 27 novembre, Aronda Nyakayirima, le chef d’état-major de l’armée ougandaise, a déclaré que
Sultani Makenga, chef militaire du M23, a accepté de se retirer des villes de Goma et de Sake et
de stopper leur avancée militaire. «Il n’a pas à poser de condition parce qu’il sait que les demandes
du M23 seront prises en compte par le mécanisme de la CIRGL comme l’indiquent les conclusions
du sommet de Kampala», a-t-il poursuivi.
Lors d’une conférence de presse, dans la matinée, le président du M23 et chef politique de la
rébellion, Jean-Marie Runiga, a néanmoins posé des conditions à ce retrait. «Avant le retrait de
Goma, le M23 demande notamment au gouvernement congolais une enquête sur la tentative
d’assassinat d’une médecin au Sud-Kivu, d’accorder la liberté de mouvement de l’opposant Étienne
Tshisekedi, la dissolution de la Commission électorale congolaise. S’il le fait, le M23 fera très vite
son retrait de Goma», a-t-il déclaré. Jean-Marie Runiga a aussi affirmé que son mouvement ne se
retirerait de la ville que s’il obtenait du président Kabila un cessez-le-feu et l’établissement d’un
calendrier des négociations qui regrouperaient aussi la société civile, la diaspora et l’opposition. Il a
exigé que les FARDC ne reviennent pas en ville et que Goma soit sous administration politique et
administrative du M23. Il a également exigé le retrait des groupes armés étrangers actifs en
RDCongo, l’arrestation du général John Numbi, accusé par certaines ONG d’être le principal
responsable de l’assassinat du défenseur Floribert Chebeya, la libération «sans condition» des
prisonniers politiques. Jean-Marie Runiga a également évoqué l’ouverture d’un couloir humanitaire,
la collaboration avec la Monusco, la sécurité dans la ville de Goma et la relance des activités
économiques dans les localités occupées par son mouvement.
Le chef d’état-major de l’armée ougandaise, Aronda Nyakairima, a indiqué que les rebelles du
M23 s’étaient engagés à un retrait total et sans conditions de Goma avant jeudi midi, 29 novembre.
De son côté, le général Sultani Makenga, a déclaré que ses troupes quitteront Goma avant
vendredi, 30 novembre.19
3. LES PROPOSITIONS DE LA SOCIÉTÉ CIVILE
Le 22 novembre, au cours d’un point de presse, le Réseau national des ONG pour la défense des
droits de l’homme (Renadhoc) a dénoncé la dégradation sécuritaire et a regretté l’incapacité du
gouvernement Matata Ponyo à protéger l’intégrité du territoire national. Selon cette plateforme,
cette équipe gouvernementale a démontré ses limites notamment sur les plans diplomatique et
militaire et appelle le gouvernement Matata à tirer toutes les conséquences de l’échec de son action.
17 Cf Le Palmarès – Kinshasa, 26.11.’12
18 Cf Reuters – Goma, 26.11.’12
19 Cf Cf Radio Okapi, 27.11.’12; Jeuneafrique.com, 27.11.’12
10
Devant la situation marquée par la prise de Goma et d’autres localités environnantes par le M23, le
Renadhoc recommande au chef de l’État la révocation de certains ministres, des responsables de la
police et de l’armée. Ce réseau a principalement visé les ministres de la Défense, de l’Intérieur et de
la Justice, le chef d’état-major général de l’armée congolaise, le chef d’état major des forces
terrestres et l’inspecteur général par intérim de la police. «Ils ont prouvé qu’ils n’étaient pas à la
hauteur de leurs responsabilités», a appuyé le secrétaire exécutif du Renadhoc, Fernandez Murhola.
La plate-forme a également conseillé l’exfiltration et l’extirpation urgente de l’armée, de la police et
des services de renseignements, de tous les officiers supérieurs et sous-officiers issus des anciens
mouvements rebelles dont le Rassemblement Congolais pour la Démocratie (RCD) et le Conseil
National pour la Défense du Peuple (CNDP). «Ils jouent généralement le double jeu et sont restés
plus loyaux au Rwanda qu’à la RDCongo», a-t-elle fait remarquer. Le Renadhoc a aussi sollicité la
révision urgente de toutes les chaînes de commandement et de la gestion logistique des forces
armées, de la police ainsi que de services de renseignement civiles et militaires. «Il est impératif que
toutes les chaînes de commandement soient gérées par des officiers loyaux, nationaux et
patriotiques. Ne pas le faire constitue un acte de haute trahison», a avisé le secrétaire exécutif de ce
regroupement.
Le Renadhoc a trouvé paradoxale l’appel à la mobilisation générale lancé par le chef de l’État et
l’interdiction à manifester que les étudiants de certaines universités ont subie de la part de la police.
La plate-forme a, par ailleurs, appelé les populations des territoires sous occupations du M23 à la
désobéissance civile généralisée envers «les autorités qui contrôlent, tuent et pillent actuellement
une partie de la province du Nord-Kivu». Cependant toute la population congolaise a été appelée à
la résistance.
Le Renadhoc a aussi conseillé plus de nationalisme, de patriotisme, de responsabilité et de cohésion
nationale à la classe politique. «Il est inconcevable que plusieurs acteurs politiques congolais se
laissent toujours instrumentalisés par le Rwanda, au profit des pouvoirs éphémères et stupides», a
regretté le réseau. Pendant que le réseau invite à la tenue d’un congrès du Parlement, il appelle
également les États véritablement amis du peuple congolais à cesser de vendre les armes au
Rwanda.20
Le 24 novembre, dans un communiqué sur «la déstabilisation de la RDCongo par des forces
extérieures», les membres du Réseau des organisations des Droits humains et d’éducation
civique d’inspiration chrétienne (Rodhecic) de la Société civile expriment leur «colère contre le
chef de l’Etat, le gouvernement et les partis politiques de la Majorité présidentielle pour ne pas
arriver à résoudre durablement la problématique de la sécurité et de la protection des populations et
des territoires de la RDCongo». Ils déplorent aussi que, «depuis plus de 16 ans, le Rwanda et
l’Ouganda ainsi que leurs alliés extérieurs, notamment les multinationales, soutiennent toutes les
rebellions contre les institutions de la RDCongo, provoquant des négociations et des accords parfois
secrets qui préparent systématiquement la prochaine guerre et les violations massives régulières des
droits humains qui en découlent». En effet, font-ils remarquer, «le gouvernement congolais a
toujours négocié et intégré des hommes de troupe et des hommes politiques issus des groupes armés
sans que cela n’apporte de solutions idoines, efficaces et durables aux problèmes d’instabilité de
notre pays».
«Les citoyens de la RDCongo n’acceptent pas le M23, la rébellion et l’occupation. Les nombreuses
victimes humaines des violations graves des droits humains ainsi que le drame humanitaire que
nous vivons à travers les nombreux déplacés et réfugiés sans assistance sont des raisons suffisantes
pour récuser ces terroristes qui agissent avec l’appui avéré du Rwanda et de l’Ouganda», affirmentils.
20 Cf Lucien Dianzenza – Les dépêches de Brazzaville – Kinshasa, 23.11.’12
11
Ils regrettent que «la corruption et l’impunité accordée comme prime aux acteurs politiques et aux
différents groupes armés, qui commettent des crimes contre la RDCongo et l’humanité, favorisent
et consolident l’insécurité ainsi que la prolifération des groupes armés dans le Pays».
Ils condamnent «l’appui avéré du Rwanda et de l’Ouganda ainsi que de leurs alliés extérieurs,
notamment les multinationales, à tous les groupes armés en RDCongo».
«Ils exigent le retrait immédiat et sans conditions du M23 de tout le territoire congolais; la
publication de tous les accords en lien avec la guerre en RDCongo; la mise en application effective
des résolutions des Nations Unies, de l’Union Africaine et de la CIRGL; la poursuite, par le Conseil
de Sécurité des Nations Unies, de tous les responsables des violations massives des droits humains
et du génocide commis en RDCongo se trouvant au Rwanda et en Ouganda; le dialogue entre les
acteurs politiques et les forces vives de la RDCongo».21
Selon plusieurs membres de la Société Civile congolaise, face à la menace du M23, il faut
construire un bloc intérieur avec l’ensemble des forces significatives du pays. Il faut que la classe
politique, Majorité et Opposition, la Société civile et toutes les forces vives du pays se retrouvent
ensemble pour des cogitations sur la question. Cela induit-il une refonte des institutions et une
redistribution des cartes? Serait-ce le prix qu’il faille payer, pour que le pays retrouve son intégrité
territoriale sans trop de casse et de frais? La réponse est dans ce dicton populaire: «On ne fait pas
d’omelettes sans casser les oeufs». Mise ensemble, la nation, à travers ses représentants à divers
niveaux, peut trouver des réponses.22
4. LES OBJECTIFS CACHÉS DE LA GUERRE DU M23
Pour Gaspard-Hubert Lonsi Koko, essayiste et observateur des rapports Nord-Sud, le M23 est
précisément composé de Congolais rwandophones et de militaires rwandais qui ont pour objectif de
s’approprier le Kivu, une région – très riche en minerais et en terres agricoles – qui attise la
convoitise du Rwanda surpeuplé. Le Rwanda, accusé de toute part comme étant le véritable
agresseur de la RDCongo, pousse le M23 à occuper le maximum de territoires en vue d’entamer des
négociations avec le gouvernement congolais en position de force. Cela permettra à Paul Kagamé
d’infiltrer des citoyens rwandais dans les institutions congolaises – l’armée, le gouvernement, les
collectivités locales… – et à administrer officieusement le Kivu, afin d’en tirer de copieux bénéfices
économiques, surtout dans le secteur minier.23
L’implication du Rwanda au Nord et au Sud-Kivu a été longtemps justifiée par des raisons
sécuritaires: empêcher les incursions des miliciens hutus et le retour de l’idéologie du génocide,
protéger les «cousins» Tutsis congolais. Aujourd’hui les forces hutues (moins de 2.000 hommes) ne
représentent plus une menace. Mais Kigali, sans l’exprimer ouvertement, souhaite que l’Est du Kivu
demeure une zone de «souveraineté partagée» et veut pouvoir compter sur une «armée dans
l’armée» et sur des alliés politiques locaux. Au coeur de cette ambition, il y a la sécurité, mais
surtout l’économie: le Rwanda fonde son expansion et son rôle au sein de la Communauté des Etats
d’Afrique de l’Est (Comesa) sur le fait d’être un «hub» aérien et une plaque tournante pour
l’exportation des minerais extraits au Congo (coltan, cassitérite, terres rares, niobium, etc.). La
découverte de gisements pétroliers a aiguisé les appétits: la société britannique SOCO (qui a des
bureaux à Kigali) a entrepris des prospections pétrolières dans le parc des Virunga au Nord-Kivu.
Quant au gisement de pétrole découvert sous le lac Albert, son exploitation devrait être partagée
entre l’Ouganda (qui va se doter d’une raffinerie) et le Congo. Mais la nappe se prolongeant jusque
21 Cf Angelo Mobateli – Le Potentiel – Kinshasa, 26.11.’12
22 Cf Le Potentiel – Kinshasa, 25.11.’12
23 Cf Jolpress.com, 23.11.’12
12
Rutshuru, aux mains des rebelles, le Rwanda, via ses alliés du M23, pourrait revendiquer de prendre
sa part du pactole.24
La reprise de la guerre dans l’Est du territoire national a pour vraie cause la création d’une province
exclusivement réservée aux Tutsi et Hutu congolais et rwandais. Les riches espaces de Masisi et
Rutshuru sont curieusement visés. Le contrôle du pétrole, des terres rares, des mines de coltan et de
cassitérite va succéder à un référendum d’autodétermination qui finirait par annexer cette nouvelle
province au Rwanda.
Dans sa question orale urgente avec débat, adressée au ministre de l’Intérieur Richard Muyej, le
sénateur Mokonda Bonza s’est interrogé sur le contenu de l’accord signé avec le CNDP en rapport
avec le découpage territorial en ces termes: «L’accord signé le 23 mars 2009 stipule, dans son
article 8, ce qui suit: Se fondant sur la nécessité d’une meilleure prise en compte possible des
réalités sociologiques du pays, le CNDP a proposé un modèle sociologique du découpage territorial
national. Quel est ce modèle de découpage?».
La reprise de la guerre dans l’Est du territoire national confirme que, en appuyant le M23, Kigali
vise à obtenir, par tous les moyens, la reconfiguration des frontières issues de la décolonisation. Le
régime rwandais ne cache plus sa détermination à redessiner la carte géographique de l’Afrique,
particulièrement dans la région des Grands Lacs africains. L’agenda caché consiste à obtenir un
espace territorial réservé exclusivement à des Rwandophones. Au même moment, les Nande seront
confinés à Beni et Lubero. Ainsi, la nouvelle province sera réservée aux Tutsi et Hutu ainsi qu’aux
«autres tribus minoritaires».
L’argumentaire soutenant le rapprochement de l’administration des administrés évoqué par le
CNDP en son temps est partagé par tous. Toutefois, accorder plus de privilège à la donne ethnique
revient à transposer sur le territoire congolais la réalité sociologique rwandaise avec les deux tribus
dominantes tutsi et hutu. La partie juteuse revenant à cette nouvelle province comprendrait les
territoires de Nyiragongo, Masisi, Rutshuru et Walikale. Le CNDP/M23 considère déjà cette option
comme un agenda prioritaire pour lequel il est prêt à mettre du feu tout l’édifice national.
Les visées expansionnistes de Kagame se traduisent également par une adaptation, en RDCongo, du
programme de l’éducation au niveau fondamental au Rwanda. Selon des sources crédibles, il est
enseigné aux enfants rwandais que le Kivu faisait partie du Rwanda. C’est tout dire sur les
intentions de Kigali: faire main basse, quel qu’en soit le prix, sur cette partie de la RDCongo. Le
décor se plante pour cet ultime objectif, pièce après pièce.
En cas d’échec, Kagame pourrait reculer, mais pour rebondir plus tard; comme il vient d’en faire la
démonstration avec le feuilleton AFDL-RCD-CNDP-M23. Croire qu’il pourrait renoncer un jour à
cette visée serait une erreur d’analyse.
Le plan se décline presque de cette manière. D’abord, l’érection de la nouvelle province dans les
limites géographiques jouxtant le Rwanda. Ensuite, procéder à un référendum d’autodétermination
piloté par les Nations Unies où autres institutions. Enfin, annexion de la nouvelle province au
Rwanda. Ce faisant, Kigali exercera sa souveraineté sur un espace plus grand, résoudra également
le problème de promiscuité de sa population avec en prime des richesses immenses du sous-sol.
Les Anglo-Saxons, qui portent à bras-le-corps cette stratégie, connaissent ce qui est enfoui dans le
sous-sol de cette partie de la RDCongo. L’entretien permanent de l’instabilité et la pérennisation du
chao dans cette partie du pays donne la parfaite démonstration des raisons cachées de cette volonté
annexionniste avérée de la part de certaines puissances occidentales.25
24 Cf Le carnet de Colette Braeckman – Le Soir, 21.11.’12
25 Cf Le Potentiel – Kinshasa, 27.11.’12
http://www.lepotentielonline.com/3470-le-cndp-m23-exige-le-decoupage-du-nord-kivu-en-deux-provinces
